(Faith) Take off your masks (délai)

“Les mots sont des armes, les mots sont des dons, les mots ne se gaspillent pas.”

— Pierre Bottero

(un) ▵ La vieillesse de l’âme, Faith la porte bien trop. Elle peut le sentir parfois, ces moments où les souvenirs se mêlent au présent, l’arrachent de la réalité. Et pourtant, elle ne peut pas, ou ne peut plus, combattre leur arrivée. Elle a ces instant d’absence, quand des visages qui lui étaient communs à une époque lui reviennent. Parents, famille, amis. Aujourd’hui morts, pire, tués par elle. Ils étaient tout, et ils sont devenus rien.  (deux) ▵ Elle les a vus, les empires. Ceux qui ont résisté, ceux qui sont tombés. Elle les a vus, les dirigeants. Rois, papes, empereurs, ministres. Ils ont tous cru pouvoir graver leurs marques dans l’Histoire, et survivre. Ils sont tous tombés, un par un. On n’échappe pas à la mort, qu’importe son rang. (trois) ▵ Le clan aurait dû être sa famille. Le clan a été sa famille. Elle en a connu des régents. Au moins deux. Et elle en a conseillé aussi. L’avantage de l’âge, quand le demi-siècle a été atteint. L’importance d’une gamine, que beaucoup n’écoutaient pas. Au début surtout. Après, elle a pris sa place. Car il ne faut pas oublier son âge réel…  (quatre) ▵ La déesse. Puis la fuite. Elle a tenu bon, pendant des siècles. Elle a tenu bon, puis elle a fini par craquer. Le clan Loth est devenu son cauchemar, l’obligeant à retenir les pulsations. La primogène qui entre en déchéance, se pare dans la lâcheté. Maintenant un jeu de traque, de cache-cache. (cinq) ▵ Se glisser dans les quartiers humains, abandonnés. Il faut se faire oublier, faire oublier sa nature. Finalement un premier avantage à sa carcasse si jeune. Personne ne peut s’imaginer ce qui se cache derrière au premier regard. Et elle fait de son mieux pour se fondre dans la masse.  (six) ▵ Reinhart. Ou l’humain qui a eu l’honneur de l’accueillir chez lui. Elle ne sait pas trop pourquoi elle reste, pourquoi elle s’accroche. Néanmoins, chez le vieil humain, il y a quelque chose de rassurant. Alors elle s’est installée, s’esquivant seulement lors des contrôles de la Milice ou  lorsque le besoin de nourriture se fait pressant. Elle part, et revient, retrouve le capharnum de l’homme. Un intérieur vivant, bien plus qu’elle ne l’est elle-même... (sept) ▵ Le Régime, comme seul ennemi. C’est ce qu’elle aime dire, se répéter. En réalité, ses ennemis… Hé bien, tout le monde l’est. Faith, elle a tellement vécu, qu’aujourd’hui elle est incapable de faire confiance. Elle connaît les humains, vampires, faës et lycans. Elle les connaît tellement. Elle sait que la trahison attend au tournant. Après tout, elle-même est ainsi... (huit) ▵ Il y a ce besoin de sang qui commence à disparaître. Oh, pas grand-chose, mais petit à petit, elle s’est rendue compte de ce que cela signifiait. La mort, qui se rapproche. La statue de cire, qui l’attend au tournant. Lentement, mais sûrement. Désormais, elle a un pied dans la tombe, et n’est pas loin d’y rajouter le second.  (neuf) ▵ La solitude comme banière. Jamais elle n’a eu quelqu’un dans sa vie depuis sa transformation. Trop farouche, elle ne se laissait pas approcher. Et maintenant, il y  a autre chose à penser, à faire tomber. Parfois, elle aimerait bien, se poser, avoir quelqu’un. Cependant, elle s’est faite une raison, et a banni l’amour de son coeur. (dix) ▵ Elle veut retrouver les plaines enneigées de ses terres d’enfance, d’humaine. Elle veut ressentir à nouveau les flocons tomber sur sa peau, l’air froid envahir ses poumons. Elle veut… Mais ce n’est que nostalgie. Parce que plus rien ne redeviendra comme avant.